jeudi 15 août 2019

Promo pêche sélectionne les futurs travailleurs de la pêche a Rosso


Samedi 1er février 2019. Une longue file d’attente peu habituelle se forme devant l’Ecole d'enseignement technique et professionnelle (EETP) de Rosso. Des dizaines de jeunes, garçons et filles, dossiers en main, font le pied de grue depuis les premiers rayons du soleil. Certains scrutent encore des feuilles accrochées devant le portail de l’établissement. Tous sont venus pour participer aux épreuves de sélection annoncées depuis quelques semaines pour la formation et l’insertion dans différentes filières de la pêche artisanale. Il s’agit d’une session ouverte par le programme «Promo Pêche », financé par le Fonds fiduciaire d’Urgence pour l’Afrique de l’Union européenne, et exécuté par trois agences dont le Bureau International du Travail (BIT). Les candidats ont le choix entre diverses filières: artisans pêcheurs, filets tournants, mécanique hors-bord, charpenterie, classification, transformation, fabrication de pirogues en polyester…
Les filles ont choisi pour la majorité la transformation ou la classification. C’est le cas de Garmi Mint Sidi : «j’ai choisi le secteur de la transformation qui me semble être le plus approprié par rapport à mes prédispositions ». D’autres filles ont opté pour la mécanique, comme Binta : «j’ai opté pour la mécanique hors-bord. J’aime relever les défis et c’est un métier où les femmes sont peu nombreuses ».
Les garçons aussi ne sont pas en reste. Beaucoup ont choisi la mécanique, par passion ou pour avoir un diplôme dans ce métier. 
Harouna : «je veux faire le mécanicien hors-bord, car j’aime ce métier». Même son de cloche pour Ahmedou Bouba Sarr : «pour moi aussi, c’est la mécanique hors-bord, par passion pour ce travail, mais aussi pour avoir un diplôme qui pourrait me faire recruter dans un chantier naval».
Les rangs s’étirent au fur et à mesure que la journée avance. Dans la cour, les candidats sont orientés vers la salle d’entretien. Là, une douzaine de jeunes d'AYAM, association de jeunes leaders formés par le BIT dans le domaine du coaching, de l’encadrement et de l’orientation professionnelle des jeunes demandeurs d’emploi, les attendent pour tester leur motivation.
Sidi Sall, membre d'AYAM explique : «AYAM, c’est l’association des Mauritaniens bénéficiaires de la YALI (Young African Leaders Initiative), mise en place du temps du président Barack Obama. Nous avons été formés par le BIT, dans le coaching, l’encadrement et l’orientation professionnelle des jeunes demandeurs d’emploi. C’est dans ce cadre que nous sommes à Rosso pour aider à tester la motivation des jeunes et les aider dans leur choix face aux différentes filières de la pêche artisanale proposées».
Un jury nommé par le Wali du Trarza a été mis en place pour la sélection définitive des candidats retenus pour la formation. Il est composé de cadres du Ministère de l’Education Nationale et de la Formation Professionnelle dépêchés depuis Nouakchott, et des représentants d’autres institutions comme l’Ecole d’enseignement technique et professionnelle, la Commune de Rosso, le Centre de qualification et de formation aux métiers de la pêche, la société civile. Les candidats passent des tests de lecture, écriture, calculs élémentaires.
L’un des membres du Jury, Mamadou Sadio Deh, chef de service à l’Ecole d’enseignement technique et professionnelle de Rosso, explique : «notre école est un centre d’excellence, et nous sommes honorés qu’elle abrite cette sélection de candidats aux métiers de la pêche artisanale, en collaboration avec le BIT. Nous participons comme membres du jury à la sélection définitive des candidats qui devront être formés dans ce cadre».
Quelques responsables du BIT et des administratifs de l’école supervisent de loin les opérations.
Lamine Diakité du BIT revient sur le processus de présélection et de sélection en cours : «nous sommes ici dans le cadre d’une présélection et d’une sélection de candidats aux métiers de la pêche artisanale qui cible les jeunes de Rosso et de Tiguent, entre le 31 janvier et le 7 février 2019. C’est dans ce cadre que nous sommes accompagnés par une dizaine de jeunes de l’association AYAM, dont le rôle est primordial dans la phase de présélection, pour déterminer la motivation des candidats».
Housseynou Kassougué, en charge du volet formation du projet Promo Pêche au niveau du BIT, revient plus en détail sur cette mission : «le projet Promo Pêche est un projet financé par le Fonds fiduciaire d'urgence de l’Union européenne et exécuté par le BIT. Dans le cadre de ce projet, il est prévu dans la composante formation professionnelle, la formation de bénéficiaires dans différentes filières de la pêche artisanale pour valoriser les chaines de valeur au niveau de ce secteur. Nous avons mené dans le cadre de cette activité, durant la semaine du 31 janvier au 7 février 2019, une mission de sélection pour des bénéficiaires au niveau de la Wilaya du Trarza, dans la capitale régionale Rosso et à Tiguent. Aux termes de cette sélection, 190 jeunes ont été retenus. Ils subiront une formation de six mois au niveau du Centre de qualification et de formation aux métiers de la pêche (CQFMP) de l’Académie Navale». 
Depuis son lancement en mai 2018, le programme Promo Pêche, financé par le Fonds fiduciaire de l’Union européenne d’urgence pour l’Afrique, mis en œuvre par le BIT, la Coopération allemande (GIZ) et l’Agence Espagnole de Coopération Internationale pour le Développement (AECID), a déjà formé plusieurs centaines de jeunes aux métiers de la pêche artisanale en Mauritanie. Objectif: former d’ici 2022, 9.000 jeunes Mauritaniens dans les métiers de la pêche artisanale.

ec.europa.eu

jeudi 14 mars 2019

Une journée de réflexion sur l’autonomisation économique des femmes en milieu rural

A l’occasion de la journée internationale des droits de la femme, l’Union européenne et ses partenaires, ont organisé, ce Mardi 12 Mars, à Nouakchott, une journée de réflexion sur l’autonomisation économique des femmes en milieu rural en hommage aux femmes rurales mauritaniennes, autonomes et résilientes.

L’objectif de cette journée était « de partager des initiatives appuyées par le programme RIMRAP/UE et ses partenaires dans l’optique de tirer des enseignements pour contribuer à améliorer les politiques en matière de promotion des femmes rurales » C’était une journée de partage d’expériences de terrain et de débat qui a vu la participation de plusieurs femmes, des experts du public invité.
Dans son discours d’ouverture, le chargé d’affaire de la délégation de l’union européenne en Mauritanie, Adam Janssen a rappelé que  » La défense des droits humains est au coeur de la construction européenne et constitue l’un des fils conducteurs de l’action extérieure de l’union européenne et de ses états-membres. Cela se traduit notamment par l’interprétation transversale de la dimension d’égalité entre homme et femme pour l’ensemble des programmes et actions que nous soutenons. A t’il ajouté.
Avant de rappeler que  » le conseil de l’union européenne a adopté en octobre 2015 un nouveau plan d’action sur l’égalité des sexes et l’émancipation des femmes dans le cadre de la coopération au développement » Poursuivant son allocution le représentant de la délégation de l’union européenne a expliqué que « ce plan d’action fournit le cadre pour l’approche de la commission européenne, du service européen pour l’action extérieure et des états-membres de l’union européenne concernant l’égalité des sexes dans les relations extérieures pour la période 2016-2020. Ce plan a été décliné en un plan d’action spécifique pour la Mauritanie couvrant la période 2018-2020. Ce plan spécifique traduit les engagements communs de la délégation de l’union européenne et des états-membres présents en Mauritanie en faveur de l’égalité des sexes et de l’émancipation des femmes et des filles, pour attirer l’attention sur le caractère à la fois transversal et spécifique. Monsieur Adam Janssen à conclu en ces termes » la défense des droits humains est au coeur de la construction. »
 Souleymane Djigo




Une journée de réflexion sur les discriminations rencontrées par les femmes en milieu professionnel [Photos]

L’espace Culturel Camara a abrité, Jeudi 14 Mars, une journée de débat et de réflexion sur les discriminations rencontrées par les femmes en milieu professionnel.


Cette rencontre, organisée par la Délégation de l’union européenne en Mauritanie, les Etats membres et en collaboration avec l’UNESCO entre dans le cadre de la célébration de la journée internationale de la femmes.

Les questions des inégalités salariales entre les hommes et les femmes, les stéréotypes…et d’autres sujet concernant les inégalités rencontrées par les femmes ont été débattues par un groupe de panélistes composé de Néne Kane, professeure d’université, Oumou Sy musicienne , Oumou Kane Directrice département Foot féminin (FFRIM) Houriya Moulaye Idriss, Journaliste Aichetou Ahmed , Femmes juristes, Sadio Ndaw de AECID.

Souleymane Djigo






vendredi 8 mars 2019

8 MARS À L’IFM : LA FEMME » ACTRICE DE DÉVELOPPEMENT DE NOS SOCIÉTÉS »

Dans le cadre de la Journée internationale des droits des femmes, l’Institut français de Mauritanie a accueilli, ce 08 Mars 2019, une série d’événements en l’honneur de la femme Mauritanienne célébrée sous le thème  » actrice de développement de nos sociétés ».
Cette journée commémorative des droits de la femme était soutenue par la Délégation de l’Union Européenne en Mauritanie, à travers le programme d’appui au 11e FED, en partenariat avec la Coopération espagnole, la Coopération allemande, ArtGallé, OIM, UNHCR, Medicos del Mundo, BIT, Zaza productions.

Au menu de la journée :
Une conférence intitulée Cinquantenaire du 8 mars en Mauritanie organisée par l’Association Internationale des Femmes Francophones et la FAO.
La conférence a connu la participation des femmes engagées pour une alimentation durable, des medecins et experts en nutrition. Ce temps d’échanges était aussi l’occasion de mettre en valeur le travail mené par des femmes.
L’initiative a permis de mettre en avant des parcours d’exception, de faire émerger les freins rencontrés par les femmes Mauritanienne. Dans l’après midi ,ce fut le tour hommes d’ être sous le podium, 10 panélistes ont été invités a débattre sur le rôle de l’homme dans les objectifs d’égalité homme-femme.
La journée s’achève dans une ambiance festive où un charmant public a eu l ‘honneur d’ entendre sur scène des femmes artistes venues d’ Europe et d’Afrique pour célébrer auprès de leur consoeurs mauritaniennes une journée spéciale en l’honneur des droits de la femme .
L’association Medicos del Mundo, s’est faite particulièrement remarquer à cette journée, par la présence derrière des stands d’une équipe dépêchée pour effectuer un travail de sensibilisation.
L »objet était de promouvoir la question du genre à travers des distributions de tshirts , casquettes et dépliants.





samedi 9 février 2019

Journée Internationale de Lutte contre les Mutilations Génitales Féminines

  Hawa, 58 ans, a commencé à exercer en tant qu’exciseuse en 1980. Elle ne se souvient pas du nombre de filles qui ont été victimes de sa pratique. Il y a quelques années, Hawa a excisé sa petite fille, mais l’opération ne s’est pas déroulée comme prévu: la petite fille a perdu énormément de sang et a frôlé la mort.

Suite à cela, Hawa a pris la décision d’arrêter de pratiquer l’excision. Après avoir participé à une séance de sensibilisation aux mutilations génitales féminines animée par CORDAK, partenaire d’implémentation de l’UNICEF en Mauritanie, Hawa a rendue public sa volonté d’arrêter en l’annonçant à tout son village.

Depuis lors, Hawa lutte contre les mutilations génitales féminines au sein de sa communauté et sensibilise elle-même les habitants.

Aujourd'hui, Hawa dit NON à l’excision.#EndFGM #Womenmatter

©UNICEF Mauritanie/A.Dragaj/2015

PS: Cette histoire a été réalisée par l'UNICEF dans le cadre du Projet "Protection des enfants mauritaniens contre la violence, l’exploitation, les discriminations, les abus et la négligence" (VEDAN), financé par l'Union européenne.

Source Page FB Ue

Plutôt que des chiffres, une histoire :

jeudi 7 février 2019

En Mauritanie, le difficile travail de sensibilisation dans la lutte contre l'excision

Le 6 février est la Journée internationale contre les mutilations génitales. En Mauritanie, l’ONG Action se bat pour mettre fin à la pratique de l’excision qui touche plus de 65% des Mauritaniennes selon l’Unicef.

Bien que ces mutilations soient en baisse depuis une dizaine d’années, ce chiffre reste extrêmement élevé et particulièrement dans les provinces. C’est dans le quartier populaire de Sebkha qu’Action a installé ses bureaux. Là, Yakharé Soumaré, la secrétaire générale de l’ONG, s’installe devant une dizaine de jeunes femmes, toutes là pour sensibiliser dans les quartiers.

« Il y a certaines communautés qui ne souhaitent pas en entendre parler, mais c’est juste une manière de sensibiliser, de communiquer et de les convaincre, explique Khoudiedji, l’une de ces jeunes femmes. Il faut avoir les mots qu’il faut. Il ne faut pas utiliser certains termes, selon le contexte. Il faut essayer de rendre le discours plus accessible. »

Bien qu’aucune loi n’existe contre ces mutilations, le gouvernement mauritanien s’est engagé dans plusieurs programmes de lutte contre l’excision, comme le souligne Yakharé Soumaré. « Nous sommes le bras technique de cette stratégie parce que nous sommes le partenaire de mise en œuvre directe avec les populations, précise-t-elle. En matière de changement de comportement, on ne peut changer le comportement que de ceux qui vivent ensemble. Donc il faut être des leurs

pour que le message soit perçu. »

Les communautés concernées s’appuient régulièrement sur la religion pour justifier ces pratiques. Mais en 2010, une fatwa a été lancée par les oulémas mauritaniens afin de condamner l’excision. « Donc quand ils nous disent qu’une fille excisée est illicite, on leur dit que la notion d’illicite ne s’applique pas à une personne. C’est là qu’on se rend compte qu’il y a un amalgame et une méconnaissance de sa religion », souligne-t-elle.

Dans certaines provinces, le taux d’excision atteint près de 100%, selon l’ONG, qui compte bien continuer son combat.


Source: RFI

lundi 14 janvier 2019

Lutte contre le VIH/SIDA : Une immersion dans la problématique pour changer les comportements




Ainsi, selon certaines études, celle-ci influe fortement sur la dynamique de l’infection. C’est fort de ce constat que l’ONG mauritanienne STOP/Sida organise, depuis le mois de juillet 2018, en collaboration avec l’Organisation Internationale pour les migrations (OIM), des causeries et ateliers de formation sur les IST et le VIH/SIDA au profit des personnes migrantes et populations hôtes résidant à Nouakchott.

Ce partenariat s’inscrit dans le cadre du projet « Initiative FFUE – Pour le renforcement de la gestion des frontières, la protection et la réintégration des migrants en Mauritanie » financé par l’Union Européenne.

Ces actions de sensibilisation participatives s’adressent à un public mixte, ciblé par quartier d’habitation, communauté d’origine ou groupe linguistique : par exemple, mauritaniens rentrés de RCA et d’Arabie Saoudite, migrants Ouest africains en transit ou bloqués en Mauritanie et dont le retour volontaire sera assuré par l’OIM. En effet, la Mauritanie est à la fois un pays de départ mais aussi de transit pour beaucoup d’ouest africains souhaitant migrer en Europe.

Dans un mot prononcé durant la dernière session de formation qui s’est tenue les 13 et 14 décembre au siège de l’ONG, Mme Fatimetou Mint Maham, en sa qualité de secrétaire exécutive, a rappelé le souci de son organisation de contribuer à la prévention du SIDA dont la mobilité constitue l’un des facteurs favorisants.

Durant deux jours, les futurs relais ont travaillé à travers des exposés-débats sur les thématiques suivantes : le rôle essentiel des pairs-éducateurs dans la lutte contre la pandémie , la communication pour le développement, la prévention (situation épidémiologique, voies de transmission, facteurs de risques et de vulnérabilité, moyens de prévention et accès aux soins), les principales IST (diagnostic, contamination, traitements), la lutte contre la discrimination dont sont encore fortement victimes les malades. Les modules ont été complétés par le témoignage d’une Personne Vivant avec le VIH (Étude de cas PVVIH), dans le but d’encourager les participants à connaitre leur statut sérologique.

La session, nourrie par de nombreux échanges et débats, s’est conclue par les recommandations des participants à STOP SIDA et à son partenaire, l’OIM.

Au terme de la formation, les participants ont aussi été soumis à un test pour évaluer leurs acquis, mais aussi pour envisager les prochaines étapes : l’organisation d’une session de dépistage volontaire.

Cet atelier de formation intervient, après la célébration, par STOP/SIDA, en collaboration avec l’OIM, de la journée internationale de lutte contre le VIH/SIDA (1er décembre). A cette occasion, une causerie a été organisée dans le quartier de Tarhil, au plus près des populations. Pendant près de trois heures et dans une ambiance récréative, 42 femmes immigrées ont bénéficié d’une sensibilisation sur le mode de contamination et de prévention de la maladie. La causerie a été suivie d’un dépistage volontaire et anonyme encadrés par des professionnels de santé, et auquel se sont présentés spontanément plusieurs habitants du quartier. Une réussite et un pas supplémentaire vers l’éradication du virus.

Partout dans le monde, le VIH/SIDA touche en priorité les populations les plus vulnérables. Or la migration peut plonger les personnes dans un état de précarité sanitaire et socioéconomique qui les éloigne des messages de prévention et de l’accès aux soins.

dimanche 13 janvier 2019

Les femmes du Brakna et du Gorgol et l’accès à la terre






 Jusque-là, la terre appartient aux hommes et les femmes n’ont qu’un faible accès à la propriété foncière et domaniale, tout au long de la Vallée du Fleuve Sénégal.

Une injustice que les femmes ont toujours dénoncé, d’où l’importance de la mission que le Fonadh, l’Union européenne et le Ministère de la Femme viennent d’organiser du 27 février au 7 mars 2018 dans les régions du Brakna et du Gorgol dans le but d’expliquer aux femmes les procédures d’accès à la terre et les techniques de leur mise en valeur.

Le Forum des Organisations Nationales des Droits de l’Homme (FONADH) en partenariat avec Oxfam, l’Union Européenne et en collaboration avec le Ministère de l’Action Sociale de l’Enfance et de la Femme(MASEF) a choisi la première semaine du mois de mars 2018 pour mener à l’endroit des femmes de l’intérieur du pays une campagne d’information, de sensibilisation et de vulgarisation sur les procédures d’obtention de titres fonciers.

Ainsi les communes de Thétiane, Djéol, Guiray, Silla, Woloum, Néré Walo, Aéré M’Bar, Médine, Niabina et Garlol, relevant des wilayas du Brakna et du Gorgol ont été visitées.

Ces localités à vocation agrosylvopastorales se caractérisent par la bravoure des femmes, fortement engagées dans les travaux champêtres, bien que ces dernières années soient marquées par une faible pluviométrie, rendant les récoltes quasi inexistantes et le couvert végétal peu fourni pour la survie du bétail et des habitants.

Durant le déplacement de la délégation dans les différentes localités, des causeries, des débats et plusieurs réunions ont été organisés avec les femmes regroupées en associations villageoises, en coopératives et en groupement d’intérêt économique (GIE) par des facilitateurs-genre du FONADH, sous la conduite de Mme Coumba Diop, Coordinatrice du projet.

L’objectif visé dans cette mission était de rencontrer, entre le 28 Février et le 7 Mars 2018, toutes les sensibilités de la société civile, en particulier les femmes, pour leur apprendre les procédures pour l’accès à la propriété foncière et les méthodes de mise en valeur des terres de culture.

La mission a également fait un plaidoyer auprès des services déconcentrés de l’Etat pour la sécurité foncière, l’accès et le contrôle de la terre par les femmes. Pour clôturer leur tournée, la mission du FONADH a choisi la capitale du Gorgol, pour la commémoration de la fête internationales des droits de la femme, en organisant en marge des activités prévues dans le programme de cette journée, une conférence sur le thème « Autonomisation des femmes, Accès des femmes à la terre » présidée par le Wali du Gorgol.



Kaedi : discriminations contre les femmes, le debat s'instaure

l'Association des Femmes Chefs de ménage n’en est pas à son premier coup d’essai dans le domaine du plaidoyer sur le droit des femmes dans le chef lieu de la Wilaya du Gorgol.

Ainsi, inscrivant sa démarche dans une suite d’activités menées à Nouadhibou, Nouakchott et Kaédi ce 21 Mai 2011, l’association par son initiative propre a organisé à l’auberge « Fatama » un débat sur « la promotion des droits de la femme ».

En présence de magistrats, d’administrateurs et de la société civile, Monsieur Isselmou Ould Abdel Khadre, le conférencier du jour a prétexté sur la base du contenu du CEDEF adoptée le 18 décembre 1979 et ratifiée le 9 Juin 2001 par la Mauritanie, pour rappeler les dispositions essentielles de la convention tout en prenant soin de faire ressortir les réserves émises par les pouvoirs publics en son article 16 relatif aux conditions de contraction du mariage .



S’il est établi que les femmes sont discriminées, il n’en fallait pas moins au conférencier de s’interroger ou même s’indigner sur l’incompréhension de l’adoption de cette convention dans son intégralité, alors que d’autres pays musulmans dont les législations s’inspirent de la « charia » ont franchi le pas, comme le Royaume du Maroc.

Auparavant madame Salimata Sy, coordinatrice du projet FAM chefs de ménage, a expliqué aux participants les attentes qui s’articulent autour du thème et a invité particulièrement la société civile à faire des plaidoyers pour jouer son rôle de contre pouvoir par rapport à la réticence des pouvoirs publics apparemment enclins à offusquer la question fondamentale de la discrimination de la femme pour quelque raison.

Aussi, dans son role, la coordinatrice du projet après le discours de bienvenue de la représentante locale de AFCF à Kaedi, Madame Marieme Kassé, s’est attelée à montrer les souffrances des femmes « sous le verni » de la modernité alors que dira t-elle le pouvoir public abdique de ses prérogatives régaliennes qui consacre son action à la promotion d’une société égalitaire.

Brossant quelques écueils relatifs à la discrimination des femmes, madame Sy a cité la loi portant code du statut personnel qui selon elle infantilise la femme tout comme le code de la nationalité dont l’inadaptation se prolonge au plan pénal notamment l’attentat à la Pudeur.

Au cours des interventions riches et variées, des recommandations fortes ont été formulées par les participants, qui dans une certaine mesure, par delà le masochisme ambiant ont tout de même porté un intérêt particulier sur la promotion des droits des femmes.

Il faut noter que FAM, sur financement de terre solidaire et de l’Union Européenne est en partenariat avec d’autres organisations des droits humains AMDH S.O.S Esclaves-AFCF et Agir ensemble qui développent suivant des axes prioritaires des thématiques allant du renforcement des capacités au recueil des lois et de leur vulgarisation jusqu’au violences faites aux femmes . pour porter au plus loin ,à travers la sensibilisation, la formation et entre autre plaidoyers la cause des femmes victimes d’atteintes de leurs droits.

RONG

Histoire de M’Barka FALL : dénouement heureux grâce à vous !

 
M’Barka FALL vous dit MERCI, MERCI, MERCI, ... "Je vous serai reconnaissante à jamais, de m'avoir aidé à soigner ma JAMBE !". Merci aux contributeurs de l'opération "Sauvez Mbarka FALL"

La bonne nouvelle de l'opération d'ablation de la tumeur de M'Barka est confirmée. Elle peut maintenant se passer de soins continus et va donc pouvoir rentrer chez elle après 10 mois passés loin des siens à Nouakchott.

Cette aventure n'est pas complètement terminée car @ACTUME a décidé d'accompagner M'Barka afin qu'elle puisse se réintégrer dans son cycle scolaire car son avenir en dépend largement.

M'Barka va enfin pouvoir jouer de nouveau avec ses amis, aller à l'école, bref être une enfant et avoir un avenir. Merci à tous de vos contributions qui ont permis de rendre l'opération possible.

Merci aussi à toute l'équipe en Mauritanie qui a fait un travail remarquable compte tenu des conditions très difficiles. Vous pouvez les remercier par email en bas de la page HelloAsso : Sauvez M'Barka FALL.

Merci pour votre élan de solidarité.

Le mariage des enfants pourrait faire perdre des dizaines de milliards de dollars aux économies africaines (Banque mondiale)

Le mariage des enfants pourrait faire perdre plusieurs dizaines de milliards de dollars aux économies africaines, a indiqué cette semaine, la Banque mondiale dans un nouveau rapport.

Selon l’étude intitulée Educating Girls and Ending Child Marriage : A Priority for Africa, environ une fille africaine sur trois, vivant dans un pays du Sud du Sahara se marie avant d’avoir atteint sa 18ème année. Ce phénomène qui touche plus de 3 millions de filles dans la région en fait celle ayant la plus forte prévalence de mariages d’enfants au monde.

Cette pratique engendre des pertes considérables (sous forme de revenus et de capital humain) pour les économies du continent, principalement dû au fait que ces jeunes filles bénéficient d’un temps de scolarisation largement en dessous de celui des garçons. Et lorsque ces dernières finissent par avoir des enfants à un jeune âge, cela affecte leur santé, ainsi que l'éducation et la santé de leurs enfants.

Une étude de cas, réalisée par les auteurs du rapport sur 12 pays abritant la moitié de la population africaine (Burkina Faso, République démocratique du Congo, Egypte, Ethiopie, Malawi, Mali, Mozambique, Niger, Nigeria, République du Congo, Ouganda, Zambie), montre qu'en raison de son impact sur l'éducation des filles, le mariage des enfants coûte à ces pays, 63 milliards de dollars en revenus perdus et en richesse en capital humain.

Pour lutter contre le phénomène, les experts préconisent entre autres, un maintien des filles à l’école en raison du fait que « chaque année d'études secondaires réduit de cinq points de pourcentage ou plus, la probabilité de se marier avant l'âge de 18 ans ».

Notons qu’en Afrique subsaharienne, sept filles sur dix achèvent leurs études primaires, tandis que seulement quatre sur dix terminent le premier cycle du secondaire.

Agence Ecofin

samedi 12 janvier 2019

La question du viol en Mauritanie : le tabou peut-il sauter ?

C’est l’histoire tragique d’une jeune fille sans histoire. L’histoire de Zeynab, âgée de 15 ans et vivant à Arafat, un quartier périphérique de Nouakchott, capitale de la Mauritanie. L’histoire d’une victime dans la fleur de l’âge, partie acheter de la menthe pour sa mère aux alentours de 15h, et embarquée de force par trois individus sous la menace d’armes blanches. C’est l’histoire d’un viol collectif, comme il en arrive malheureusement trop souvent en Mauritanie. Ramenée inconsciente chez elle au crépuscule par trois personnes, dont deux portant un uniforme de police – probablement ses agresseurs eux-mêmes –, l’enfant ne témoignera qu’à son réveil, une fois à l’hôpital.
Son histoire, relatée sur le portail d’information en ligne Cridem le 31 août dernier, c’est celle des femmes mauritaniennes, victimes d'une explosion des violences à leur égard ces dernières années. Rappelons d’ailleurs que la criminalisation du viol fait l'objet d'un flou juridique en Mauritanie et n'est, de fait, pas appliquée. Pour autant, des acteurs de la société civile tentent de se saisir du sujet et de venir en aide aux victimes. Qu’en est-il vraiment, et comment expliquer cette situation qui voit les tragédies s’enchaîner ?
Présentés comme des faits divers par la presse mauritanienne, les récits de ce type se sont multipliés ces dernières années. Or, ce phénomène devrait alerter et mobiliser tous les types d’acteurs, car le viol constitue un acte d’une violence inouïe qui prend facilement le pas sur la vie des victimes. En plus de représenter une menace perpétuelle pour toutes les femmes. Prendre simplement le taxi une fois la nuit tombée revient déjà à prendre un risque, en particulier en direction des quartiers périphériques de la capitale.
Une certaine prise de conscience semble avoir émergé ces dernières années. Deux évènements sont notamment venus bousculer les consciences. Le premier est l’enlèvement de Penda Sogue dans un taxi, violée et assassinée dans la nuit du 27 au 28 mars 2013. Rentrant de chez sa sœur de la commune (Moughataa) de Teyarett vers le quartier Sixième (commune d’El Mina), cette jeune épouse de vingt ans et mère d’un enfant de trois ans s’est faite piégée par trois hommes qui n’en étaient pas, semble-t-il, à leur premier fait d’armes, et qui se servaient pour cela de leur taxi. Trois suspects sont rapidement arrêtés dans un état attestant une forte consommation de drogue, à bord de leur véhicule dont une fouille permet de trouver la pièce d’identité de la victime. Une jeune fille témoigne même leur avoir échappé la veille. Finalement, le corps mutilé de Penda Sogue est retrouvé le lendemain dans le quartier de Tarhile, accusant des traces de viols, les yeux arrachés, les membres et le cou disloqués, un couteau enfoncé dans le crâne et ressortant par la nuque.
Le 3 avril suivant était organisée une marche pour dénoncer les viols et les violences faites aux femmes, et pour demander à la Justice de condamner les suspects à la perpétuité, et aux autorités de faire appliquer l’enregistrement des taxis.
Le deuxième électrochoc prend lieu la même année, le 27 octobre. Il s’agit du cas de Kadji Touré, six ans seulement, toujours en périphérie de Nouakchott. Disparue ce dimanche-là vers 10h du matin, le corps de celle que l'on connaît comme Yaye dans son quartier de Kouva est retrouvé sans vie, quelques heures plus tard sur la plage, vers l’hôtel Ahmedi, avec des marques de viols. Comme pour Penda Sogue, les manifestations se succèdent les jours suivants : un sit-in pacifique devant la présidence le 31 octobre, une marche Stop au viol entre le Ministère de l’Intérieur et le Palais de Justice le 5 novembre, etc. Mais peu de changements surviennent, en particulier de la part des autorités.
Sit-in organisé par l'initiative eTkelmi devant le Ministère de la Justice, pour réclamer des mesures politiques en faveur de la criminalisation du viol en Mauritanie (18 février 2015, Nouakchott).
Sit-in organisé par l'initiative eTkelmi devant le Ministère de la Justice, pour réclamer des mesures politiques en faveur de la criminalisation du viol en Mauritanie (18 février 2015, Nouakchott).
Depuis, les récits d’horreur sont devenus assez réguliers dans les médias, et notamment les sites d’information en ligne. La violence semble même s’accroître, et le sentiment de sécurité demeure trop souvent inaccessible pour de nombreuses femmes et jeunes filles. On peut évoquer, par exemple, l’affaire de la petite Zineb Mint Abdellahi, dix ans, attirée dans un traquenard alors qu’elle se rendait à l’école coranique, avant d’être violée et immolée par le feu, en décembre 2014 dans la commune d’Arafat, toujours à Nouakchott. Grièvement blessée suite à ses brûlures, elle a succombé en arrivant à l’hôpital. Deux suspects ont alors été arrêtés. Ils ont été condamnés à mort au mois de juillet 2015 – la peine capitale n’est pas appliquée en Mauritanie depuis 1987 (à l'exception des évènements de 1989-1991).
Plus récemment, le 11 février 2016, Roughaya Mint Ahmed, âgée de huit ans, était retrouvée pendue dans la commune d’Arafat, après avoir été violée. Ses agresseurs sont restés introuvables. Huit jours plus tard, le 19 février, rebelote dans la commune de Riyad, au niveau du quartier de PK 8 : une fillette de sept ans est découverte, inanimée et saignante, dans une concession abandonnée. Malgré des témoignages de voisins, le principal suspect n’a pas été inquiété. D’aucuns affirmant qu’il aurait des relations au sein du commissariat de police de Riyad 2, ou que d’autres personnes craindraient des représailles.
Dans tous les cas, les forces de sécurité sont généralement aux abonnés absents s’agissant des affaires de viols. La multiplication des affaires de violences atteste du fait que depuis Penda Sogue et Kadji Touré, bien peu de choses ont changé. Et pour cause, les raisons sont à chercher en profondeur.
Une question de société qui en soulève d’autres
Fait assez rare pour être souligné, la Cour criminelle de Nouakchott a condamné quatre ex-agents mauritaniens de la Sécurité routière (GSSR) le 18 mars 2014, à des peines de deux à sept ans de prison ferme pour le viol, fin 2013, d’une Sénégalaise serveuse dans un restaurant de Nouakchott. Cette agression avait suscité une série de manifestations en novembre et décembre 2013 contre les violences faites aux femmes et pour réclamer justice. Mais force est de constater que de manière générale, les histoires de viol sont le plus souvent étouffées. Et celles qui se retrouvent médiatisées, celles qui choquent l’opinion, qui provoquent des marches, qui suscitent des condamnations et la compassion apparente des responsables politiques ou religieux, sont celles qui s’accompagnent du meurtre et de la torture. Le témoignage de la mère de Zineb Mint Abdellahi, rapporté dans le film-documentaire « Ni consenti, Ni provoqué », du réalisateur Abdellahi Dia, en 2014, est à cet égard édifiant, quand, en larmes, elle dit : « Le crime de viol aurait été suffisant, mais il a fallu qu'ils la tuent ». De façon dramatique, le viol seul suffit rarement à susciter l’indignation générale. Car cette question reste encore tabou dans le pays, et une source d’humiliation pour la femme victime et sa famille. Sans compter que les histoires de viol suscitent parfois des interrogations sur les mœurs et l’attitude de la victime : que faisait-elle dehors le soir ? Comment était-elle habillée ? Qu’a-t-elle fait qui a amené un homme à la violenter ?
Pire, l’attitude des hommes est elle-même parfois justifiée, sous couvert qu’il s’agirait pour eux d’une « maladie » (terme employé par de nombreux Mauritaniens), qu’ils seraient incapables de se contrôler, et que par conséquent ce serait bien à la femme de se prémunir et d’éviter de sortir le soir pour éviter les risques. En allant plus loin, on en déduirait même que les femmes provoquent, obligent un peu les hommes à les violer, en se pavanant devant eux. Les raisonnements excusant la violence et le harcèlement paraissent d’autant plus absurdes que bon nombre de viols concernent des femmes mineures, voire des enfants, dont on suppose mal que la sexualité débridée les ait poussées à sortir « provoquer » des hommes adultes.
Si la question du viol est à ce point occultée au quotidien, il faut en chercher les causes profondes dans la place de la femme et dans la perception de la sexualité au sein de la société mauritanienne – ce que nous avions traité dans un article de juillet 2016 intitulé : entre la religion et les pratiques sociales : quelle condition pour les femmes mauritanienne?
Prenons le cas du mariage : dans bon nombre de cas, celui-ci ne doit pas tant constituer l’expression de sentiments amoureux, mais bien davantage la conception que la famille et l’entourage se fait d’un « bon mariage » (avec une « bonne famille », avec un homme au moins de même caste ou niveau social, avec un homme de la même communauté, etc.). Si cela devient peut-être un peu moins vrai avec les générations les plus jeunes, la persistance d’une forte endogamie communautaire et sociale démontre tout de même une influence encore prégnante de la tradition, des anciens, de la famille. Quand ce ne sont pas carrément des enjeux financiers qui entrent en compte. Tout cela révèle une conception avant tout fonctionnelle du mariage, qui emprisonne la femme dans sa mission reproductive et sexuelle.
Or, si l'on y ajoute les contraintes vestimentaires et la séparation physique (qui va jusqu’à ne pas se serrer la main), ajoutées à un devoir d’abstinence avant le mariage (sans doute bien mal respecté), ce cocktail crée des situations paradoxales où les agresseurs non seulement voient leur appétit sexuel aggravé, mais de surcroît peuvent voir dans les contraintes imposées aux femmes la justification de leurs propres vices. Autrement dit, si les femmes se voient imposées l’essentiel des interdictions et des tabous, cela induit que ce sont elles le problème. Or, la victime n’est ni responsable ni coupable, et si un homme n’est pas en mesure de se maîtriser, alors le problème vient bien de lui et non de la femme qui aura le malheur de le croiser.
La question des violences sexuelles soulève des problématiques et des intérêts très divers. Ainsi, toucher au problème des viols de mineurs impose de s’attaquer aux mariages précoces et forcés, dans le cadre desquels toute relation sexuelle est par définition non consentie, et constitue donc un viol. Autre exemple : celui de l’esclavage sexuel. Des pratiques persistantes d’esclavage sont régulièrement dénoncées par diverses organisations de la société civile (elles concerneraient 1,058% de la population mauritanienne, soit 43 000 personnes selon l’édition 2016 du Global Slavery Index publié par l’ONG Walk Free), notamment dans la communauté maure qui est touchée par l’esclavage sexuel, c’est-à-dire une mise à disposition du corps de la femme esclave auprès de son maître. Plus largement, la misère rurale et l’accélération du processus d’urbanisation depuis la fin des années 1970 ont produit de nouvelles formes de salariat domestique. Des milliers de filles venues des zones rurales ou de familles pauvres se retrouvent employées par les classes moyennes et aisées comme bonnes à tout faire. Ce travail, non réglementé, souvent exténuant et mal payé, voire non rémunéré, les expose à de fréquentes violences physiques, verbales ou sexuelles. Les filles domestiques appartiennent principalement aux ethnies minoritaires (peuhl, wolof et soninké) et aux couches sociales haratines (les « Maures noirs », issus de la communauté des anciens esclaves). Dans le cas de ces dernières, il semble que le travail domestique n’est souvent qu’un travestissement des relations de servilité anciennes.
De manière générale et comme dans la plupart des pays du monde, il est probable que la plupart des abus et violences sexuels aient d'abord lieu dans la sphère privée, au sein même du foyer et du cercle familial. Cette question des violences domestiques est encore très loin de constituer un problème de sécurité publique, au yeux des gens, comparativement aux violences dans la rue ou dans les transports en commun.
La question du viol en Mauritanie : le tabou peut-il sauter ?
Il est important de noter que le viol n'est pas seulement celui qui arrive dans la rue. Il faut attirer l'attention sur les viols causés par les mariages précoces d'une part, et d'autre part les violences morales que les femmes subissent dans les foyers, qui à mon avis font autant ou plus de ravages chez la femme, car plus difficiles à prouver devant les tribunaux, et donc toujours impunis.
Aisha Mint Salem, présidente de l'association « Violences et mariages précoces », basée à Nouakchott.
Le viol, sujet tabou et facteur de honte pour la fille et pour la famille
Dans ce contexte social, marqué par l'expropriation du corps de la femme par la société, comment apprécier ce que peut constituer un abus sur le corps tel que le viol ? On devine que la tâche est ardue. En milieu maure, la situation est compliquée par les modes de séduction : une violence de prime abord y est la règle. La femme est censée prendre, par pudeur, par convention, une posture de refus, de refus du plaisir, ce qui floute déjà la notion de « consentement ». Les techniques de séduction comptent la poésie par exemple, mais surtout les rencontres doivent (au moins en apparence) relever du hasard. La fille ne doit pas montrer qu’elle est consentante. Un exemple de posture, dans les villages : quand le garçon attrape le parv (voile). Ce moment où le garçon tire sur le tissu, où la fille se débat, s’inscrit dans le processus de séduction. En milieu urbain, au collège, au lycée, on observe des résidus de comportements similaires. Les jeunes vont discuter, mais le refus doit être au moins apparent. Par convenance, la fille n’exprime pas de désir, de disposition physique. Cela fait partie du jeu amoureux et sexuel.
S’agissant, très précisément du viol, la sociologue Mariem Mint Baba Ahmed, que nous avons interrogée, explique que « le gros interdit reste la pénétration. Parce que cela se double de l’interdit religieux, de l’honneur, du risque d’être enceinte, de la perte de virginité dans certains cas ». « Mais par exemple, ajoute-t-elle, quelqu’un qui forcerait une fille comme ça, en la violentant, ou autre, tant qu’il n’y a pas eu pénétration, il n’y a pas eu viol. Il n’y a même pas eu violence ». La situation s’empire dès qu’on se tourne vers une femme haratine, et dont le corps n’a par essence dans l'imaginaire collectif, pas d’honneur à préserver. Chez les Haratines, les naissances hors mariage ne posent pas de problème, de même que la notion de viol n’existe pas. Traditionnellement, l’apprentissage de la sexualité des jeunes Maures se faisait souvent auprès des femmes esclaves, le corps étant à la libre-disposition des maîtres. Une pratique de l’esclavage sexuel qui a pu trouver une justification religieuse. Encore récemment, dans une émission sur les fatwas datant du 12 septembre 2014, Mme Suad Saleh, professeure en théologie à Al-Azhar, affirmait que les musulmans qui capturent des femmes dans une guerre légitime contre leurs ennemis peuvent les posséder et en faire des esclaves sexuelles. « En vue de leur humiliation, déclarait-elle, elles deviennent la propriété du commandant militaire, ou d’un musulman, et il peut avoir des relations sexuelles avec elles, tout comme il a des relations sexuelles avec ses épouses ».
Surtout, il faut prendre conscience que le viol (c’est-à-dire la pénétration non consentie) ne choque pas tant pour le mal qui est fait à la femme elle-même. Celle-ci est considérée comme une ratée. On considère surtout qu’il y a eu un manquement dans sa préservation, et que soit elle-même, soit sa mère est responsable. Le viol est pensé en termes de perte d'honneur, non en termes de douleur pour la victime. Mariem Mint Baba Ahmed ajoute à ce propos : « Il faut arrêter d’infantiliser les gens. [...] C’est un enfant gâté, mais par définition, un enfant gâté, c’est un enfant qui ne sait pas se protéger. […] La femme violée, la représentation de ce qu’elle a subi n’existe pas, c’est l’honneur qui est violé. Il faut parler de la souffrance ! C’est un être humain à part entière ».
Les lacunes du droit mauritanien
Dans toute société respectant la dignité de la personne humaine (y compris en chaque femme), il semble aller de soi que la loi devrait protéger chaque citoyenne et chaque citoyen contre les atteintes à son intégrité physique. Ce qui reste malheureusement loin d’être le cas en Mauritanie, s’agissant du viol.
Concrètement, que dit le droit mauritanien en la matière ? La question est traitée à la Section IV du code pénal, intitulée « Attentats aux mœurs de l’islam ». Premier élément frappant, le sous-titre de cette section se compose comme suit : « Hérésie, apostasie, athéisme, refus de prier, adultère ». Le viol n’y figure pas. Il est traité brièvement par deux articles, 309 et 310, situés entre l’article 308 condamnant l’homosexualité et l’article 311 sur le proxénétisme et la prostitution.
L’article 309 se décline comme suit : « Quiconque aura commis le crime de viol sera puni des travaux forcés à temps sans préjudice, le cas échéant, des peines de Had et de la flagellation si le coupable est célibataire. S’il est marié, seule la peine capitale sera prononcée. Toutefois, la tentative du crime de viol ne sera punie que de la peine des travaux forcés à temps ».
Mettons de côté le débat qu’il y aurait à tenir sur le principe même de la prescription de châtiments corporels et sur celle de la peine de mort. On peut au moins retenir de cet article que le viol est bien reconnu comme un « crime ». Une distinction est faite entre violeurs célibataires et violeurs mariés – ces derniers étant d’office condamnés à la peine de mort, sans que les modalités (lapidation, décapitation, etc.) ne soient toutefois précisées, ce qui n'est pas courant. Les conditions et la durée des travaux forcés ne sont pas précisés. Quant aux peines de Had (de l’arabe ḥadd حدّ, qui signifie limite, borne, définition), il s’agit, en droit musulman, de l’ensemble des peines légales prescrites par le Coran ou la Sunna.
L’article 310 apporte juste quelques précisions dans le cas de certaines personnalités (publiques ou en lien particulier avec la victime) : « Si les coupables sont les ascendants de la personne sur laquelle a été commis l’attentat, s’ils sont ceux qui ont autorité sur elle, s’ils sont des serviteurs à gage des personnes ci-dessus désignées, s’ils sont fonctionnaires ou ministres de culte, ou si le coupable quel qu’il soit a été aidé dans son crime par une ou plusieurs personnes, la peine sera celle des travaux forcés à perpétuité et la flagellation, si le coupable est célibataire. S’il est marié, seule la peine capitale sera prononcée ».
Autant dire que de telles condamnations défrayent rarement la chronique en Mauritanie. Non seulement le code pénal, qui repose en grande partie sur la Charia (loi islamique), ne définit pas le viol et la violence sexuelle, mais il n’explique même pas comment le viol doit être démontré. La victime est donc laissée devant un vide juridique. Dès lors, les condamnations peuvent dépendre du point de vue personnel des juges. Ce qui, dans une société patriarcale et conservatrice, donne forcément lieu à de très, très rares condamnations. Bien souvent, le viol est tu car il constitue une honte pour la famille et pour la victime, qui risque même d’être pointée du doigt pour l’avoir soit disant suscité. Certaines affaires de viols se règlent par ailleurs à l’amiable entre les familles. Au final, le nombre de viols déclarés et faisant l’objet d’une plainte ne dépasse pas quelques centaines chaque année, ce qui est bien en-deçà de la réalité, si l’on en croit les associations actives sur ce sujet.
En l’absence de précisions, dans le code pénal, sur les preuves à apporter pour justifier d’un crime de viol, de nombreux juges cataloguent automatiquement les sévices sexuels dans la catégorie des relations extra-conjugales volontaires – un crime connu sous le nom de « Zina » (الزنا) dans la loi islamique. C’est l’article 307, situé juste un peu en amont dans la même rubrique, qui porte sur ce crime, stipulant que « [tout] musulman majeur de l’un ou l’autre sexe, coupable de crime de Zina commis volontairement et constaté, soit par (4) quatre témoins, soit par l’aveu de l’auteur, soit, en ce qui concerne la femme, par un état de grossesse, sera puni publiquement, s’il est célibataire, d’une peine de flagellation de cent (100) coups de fouet et d’un an d’emprisonnement. […] Toutefois, la peine de mort par lapidation, Tajoum, sera prononcée à l’égard du coupable marié ou divorcé ». Rattacher l’acte de viol au crime de Zina, de la part du juge, revient à sous-entendre clairement que la victime est au moins partiellement consentante. Cela revient aussi à la condamner selon les modalités décrites à l’article 307, ce qui constitue un élément dissuasif supplémentaire pour les femmes victimes. Ainsi, en 2003, une jeune fille de 15 ans, si l'on en croît un document de plaidoyer de l'Association Mauritanienne des Droits de l'Homme (AMDH) datant de 2011, fût victime d'un viol collectif, pour lequel sa famille déposa une plainte. À la suite de quoi elle fût arrêtée par la police, puis déférée devant le Procureur de la République. Inculpée de Zina, elle resta trois semaines en prison avant d'être jugée et acquittée.
Résultat : pour cela et en raison de l’humiliation sociale que représente le viol pour la victime, dans des milieux conservateurs comme en compte la société mauritanienne, la première difficulté consiste déjà à convaincre une fille violée de se faire connaître.
Outre la loi, pour que davantage de cas d’agression sexuelle soient traités devant les tribunaux, il faudra voir évoluer la perception des gens vis-à-vis des victimes – et que celles-ci soient considérées comme telles –, mieux former les magistrats et réformer le code pénal et le système judiciaire.
Des associations souvent démunies devant la tâche à accomplir : convaincre la société
Non seulement les juges prennent une posture souvent défavorable à la victime, mais les associations travaillant dans l’accueil des femmes victimes de violence souffrent d’un manque de soutien criant des pouvoirs publics, et d’une carence en ressources humaines formées au travail social ou psychosocial. Certaines organisations, telles que l’Association de Lutte Contre la Dépendance (ALCD), l’Association Mauritanienne pour la Santé de la Mère et de l’Enfant (AMSME), l’Association des Femmes Chefs de Famille (AFCF), ou encore l’Association Mauritanienne des Droits de l’Homme (AMDH), tentent ainsi, tant bien que mal, d’accompagner les victimes dans leurs démarches auprès de la police, et tout au long des procédures administratives nécessaires pour obtenir une condamnation. Elles leur apportent autant que faire se peut un soutien psychologique. Mais il est clair que les moyens, qui devraient d'abord et avant tout venir de pouvoirs publics préoccupés de la sécurité et du bien-être des citoyens, ne sont pas au rendez-vous.
La question du viol en Mauritanie : le tabou peut-il sauter ?
Boutons les violences à l'égard des femmes, hors de nos maisons, de nos lieux de travail et de nos pays.
La femme mauritanienne, par sa diversité, de coutume et de tradition porte un lourd fardeau, à savoir représenter sa famille, sa communauté et sa religion, ce qui constitue pour elle un grand défi par rapport à son engagement dans la lutte contre les violences, en faveur des droits des femmes notamment.
De l'autre côté, nous devons signaler que sur les 74 articles du projet de loi portant sur les violences basées sur le genre, ce dernier ne parle pas des violences faites aux hommes et aux enfants (filles et garçon), qui sont fréquentes aussi aujourd'hui en Mauritanie.
Les réactions suscitées par le récent « Projet de loi relatif aux violences basées sur le genre », adopté par le Sénat mais bloqué à l'Assemblée nationale depuis le mois de janvier dernier, montrent que le chemin à parcourir est encore long et semé d'embûches. Des députés, des religieux, mais aussi des intellectuels et des universitaires dont on attendait des réactions plus constructives sur un texte certes imparfait mais visant tout de même à répondre à l'urgence sécuritaire des violences sexuelles, s’y sont opposés au prétexte que certaines dispositions seraient contraires à la Charia – théoriquement la principale source du droit mauritanien. Parmi les points soulevés, on trouve notamment l'âge d'autorisation du mariage fixé à 18 ans, ainsi que l'usage du terme « genre », dont certains fustigent l'origine occidentale et le risque qu'il introduise des éléments favorable à la reconnaissance de droits pour les homosexuels. Et l'intervention, au niveau du Sénat, du Ministre de la Justice Brahim Ould Abdallahi, qui y a garanti que le projet de loi était « conforme aux principes de la Charia » et avait reçu « l'aval des oulémas et imams mauritaniens », n'aura pas suffi à anticiper la fronde des députés – en tête desquels ceux du Rassemblement National pour la Réforme et le Développement (RNRD-Tawassoul), parti islamiste de l'opposition.
Ce texte est globalement mal construit et mal préparé, et compte bon nombre de carences juridiques. Les notions de « violences sexuelles », de « viol » et de « violences basées sur le genre » sont utilisées à tour de rôle sans cohérence claire et comme si elles étaient totalement interchangeables. Le viol des hommes ou des enfants n'y est même pas mentionné. Toutefois, il faut admettre que certaines dispositions constituent potentiellement de réelles avancées (si elles sont appliquées correctement) en faveur de la sécurité et de la prise en charge des victimes, ainsi que de la condamnation des violeurs. On peut citer notamment la prise en compte, comme pièce à conviction, du rapport médicolégal (art. 35), le recours comme preuve à l'examen de l'ADN (art. 39), la mise en place de numéros verts (art. 58), la création d'unités spéciales au sein de la police nationale spécialisées dans la prévention des agressions sexuelles contre les femmes (art. 59), ou encore la création de services d'accueil et d'information assurant un hébergement aux victimes pour leur permettre de se reconstruire (art. 64). L'article 40 du projet de loi garantit d'office « l'assistance judiciaire » et « la présence de l'avocat ». La présence d'un psychologue est même rendue obligatoire (art. 45) durant les audiences, qui peuvent se dérouler à huis clos à la demande de la plaignante (art. 47). Autre avancée : le traitement des femmes victimes « ayant contracté des maladies vénériennes est pris en charge par le Ministère de la Santé » (art. 52).
La question du viol en Mauritanie : le tabou peut-il sauter ?
Les violences sexuelles sont un phénomène nouveau et croissant dans la société. Le Parlement doit adopter une loi pour lutter et faire disparaître le problème, et la loi doit s'appliquer vraiment.
Raghiye Mint Abdellahi, diplômée en Économie à l'Université de Nouakchott et présidente de l'association « Les jeunes filles qui agissent dans la société ».
En matière de condamnation, le viol « ne peut être correctionnalisé » (art. 50), c'est-à-dire passer du qualificatif de « crime » à celui de « délit », et (mesure plus polémique dans les milieux juristes) les agressions sexuelles commises sur les femmes deviennent « imprescriptibles » (art. 51). Sur la prévention, le projet de loi prévoit que les pouvoirs publics adoptent un plan triennal de lutte contre les agressions sexuelles à l'encontre des femmes (art. 54), mènent des campagnes de sensibilisation (art. 55) et transmettent, au sein des centres de formation et d'éducation, les connaissances et les méthodes facilitant la détection des violences sexuelles (art. 56). En outre, les associations de lutte contre les violences basées sur le genre, déclarées depuis au moins cinq ans, pourraient dorénavant « se porter parties civile au procès » (art. 53). L'article 4 portant sur les circonstances aggravantes stipule que « les perversions de l'auteur de violences basées sur le genre, sa position, ses liens avec la victime, [...] la vulnérabilité de la victime, les circonstances de l'infraction [...] constituent des circonstances aggravantes dans le prononcé de la peine par le juge ». Le contexte dans lequel se déroule le crime ne saurait donc constituer, en aucun cas, un motif de circonstance atténuante. Même si l'application avec succès d'une telle disposition implique un changement radical de mentalité et de perception de la part des juges eux-mêmes, on ne peut contester que dans bon nombre de situations (dont les agressions dans les taxis à des heures tardives), cet article aurait au moins le mérite de déculpabiliser juridiquement la victime et de mettre l'intégralité de la faute sur l'agresseur.
Enfin, point non négligeable : le crime de viol y est (enfin !) défini : « Constitue un viol tout acte de pénétration vaginale, anale ou buccale de quelque nature que ce soit commis sur la personne d'autrui sans son consentement par violence, contrainte, menaces ou surprise » (art. 7). Le harcèlement sexuel est également reconnu comme un délit, passible de six mois à trois ans de prison et de 100.000 à 500.000 ouguiyas d'amende en fonction de la situation, et défini comme « tout propos, acte ou comportement à connotation sexuelle fondé sur le sexe ou la prise en compte de la sexualité, réelle ou supposée d'une femme, ayant pour objet de porter atteinte aux droits et à la dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant ou humiliant » (art. 8). Les violences conjugales (« tout conjoint ayant volontairement provoqué des coups et blessures ou pratiqué une violence contre son conjoint, qu'elle soit physique, morale ou psychologique ») sont passibles d'une peine d'emprisonnement de deux mois à cinq ans, et sont donc enfin reconnues.
Sans qu'elles aient été spécifiquement mentionnées dans les médias (qui ont raconté tout et n'importe quoi sur ce projet de loi, en tête desquels – comme souvent – le Cridem qui partage les informations sans vérification aucune, et au point qu'il soit légitime de se demander combien de journalistes l'ont réellement lu), deux dispositions ont pu gêner, plus profondément, ses détracteurs. Le texte sanctionne, en effet, l'imposition d'un « comportement ou d'une attitude à son conjoint » (art. 16), ainsi que l'empêchement d'« exercer ses libertés publiques » (art. 19). On comprend facilement en quoi de tels articles peuvent gêner les gens pour qui le comportement d'une femme doit faire l'objet d'un contrôle, et qui voudraient, par exemple, conditionner les allers et venues à la stricte autorisation du mari.
Bon nombre d'associations et d'initiatives, y compris parmi les jeunes générations, ont émergé à la suite des viols et meurtres de jeunes filles et d'enfants qui avaient défrayé la chronique en 2013. On peut en citer au moins trois. L'Association des jeunes filles actives dans la société, essentiellement basée à Riyad, une commune périphérique de Nouakchott, est née en 2014 en menant des actions symboliques (telles qu'une marche de jeunes filles, habillées en blanc), et travaille désormais davantage à créer des espaces d'apprentissage et d'expression pour les jeunes filles. L'initiative eTkelmi (اتكلمي, « parle » en arabe, adressé à une femme), née en 2013 et composée pour l'essentiel de jeunes femmes militantes de la communauté maure, a mené quelques sit-in devant le Ministère ou le Palais de Justice, et réalisé une vidéo de plaidoyer contre le viol il y a trois ans. Aujourd'hui, ses membres sont surtout actives sur les réseaux sociaux. Sa revendication principale : la modification de trois articles du Code pénal (articles 307, 309 et 310) pour parvenir à une criminalisation effective du viol en Mauritanie.
Enfin, on peut citer un consortium d'associations de jeunes de la commune de Dar Naim, à Nouakchott, qui s'est réuni en 2015 autour d'un projet intitulé « Touche pas à ma sœur / تلمس أختي لا », cofinancé par la coopération française et appuyé par l'ONG Caritas. Il comportait notamment des actions de sensibilisation (porte-à-porte, concerts, etc.) et des sessions de dialogue intergénérationnel réunissant jeunes filles et parents pour tenter de lever certains sujets tabous.
Une autre initiative, plus récente, mérite également d'être citée, bien qu'encore en cours de gestation. Depuis l'été 2016, des maîtres en arts martiaux et en sports de combat se réunissent deux fois par semaine à la nouvelle Maison des Jeunes de Nouakchott, et travaillent à former des jeunes femmes sur un programme de self-defense qu'ils ont construit eux-mêmes, sur la base des techniques de défense de leurs différentes disciplines. Cette démarche, intitulée RIM Self-defense réellement novatrice en Mauritanie en ce qu'elle place les femmes comme actrices de leur propre sécurité, tout en créant des espaces de solidarité et de réappropriation du corps, s'est lancée sous l'impulsion d'une militante discrète, Dioully Oumar Diallo, déjà à l'initiative de l'application TaxiSecure en 2014, dont l'objectif est de prévenir les agressions sexuelles dans les taxis en permettant, à terme, de vérifier leurs numéros d'enregistrement, d'envoyer un message d'alerte à ses proches et de géolocaliser la victime.
La question du viol en Mauritanie : le tabou peut-il sauter ?
Notre corps nous appartient. Il faut outiller les filles de manière permanente, pour qu'elles puissent se défendre contre le viol.
Les langues se délient, mais les obstacles restent immenses, tant la considération de la femme et de ses droits semblent précaire. Dans le cas de l'Association des jeunes filles actives dans la société, sa présidente Raghiya Mint Abdellahi nous raconte que rapidement, les actions de sensibilisation vis-à-vis des habitants de Riyad ont dû laisser place à d'autres types d'activités, car trop sensibiliser lassait les gens, voire donnait l'idée à certains garçons d'aller agresser. Dans le cas de l'application TaxiSecure, l'équipe de développeurs qui le portait a rapidement fait face à la réticence des pouvoirs publics à partager les données sur les taxis enregistrés, même pour un outil de prévention des violences. Idem s'agissant de l'initiative RIM Self-defense, qui soulève déjà bien des réactions et révèle ainsi les nombreux préjugés à l'égard des femmes, de leur capacité à se défendre et de l'urgence sécuritaire de la situation.
La question du viol en Mauritanie : le tabou peut-il sauter ?
Je défends toujours la cause des gens fragiles qui vivent leurs problèmes dans le silence et qui n'ont aucun moyen de les résoudre. Le « giving back » est ma source d'inspiration. En ce qui concerne les problèmes liés aux droits des femmes, je pense que tout peut se résoudre tant qu’il y a un brin d’espoir.
Réagissant à la forte opposition au récent projet de loi sur les violences basées sur le genre, y compris de la part d'intellectuels et universitaires, l'une des membres de l'initiative eTeklmi, Mekfoule Ahmed, affirmait récemment, lucide sur la situation : « Les réactions nous montrent que nous avons échoué, depuis trois ou quatre ans, à sensibiliser les gens et à faire évoluer les mentalités sur cette question des violences sexuelles. Il faut repenser notre stratégie ». Il est probable qu’une meilleure collaboration entre les groupes de femmes qui se battent, chacun à son échelle et à sa manière, sur le front de l’émancipation et des droits, constitue l’une des clés de ce combat. Une association de jeunes visant à former des filles en informatique et à renforcer leur place dans le secteur du numérique – comme le fait par exemple l’association InnovRIM à Nouakchott –, même si elle se positionne à première vue dans le domaine des nouvelles technologies, partage en réalité des intérêts convergents avec une initiative comme eTkelmi, et contribue dans la mesure de ses moyens à l’émancipation de la femme. Une ONG comme Caritas qui travaille à l’autonomisation des femmes à travers la formation professionnelle, l’accès au micro-crédit et l’appui à l’organisation en coopératives, apporte sa contribution à l’émancipation de la femme. Sans se dire nécessairement « féministes » et sans porter d'idéologie particulière, bon nombre d’acteurs réalisent par leurs actions sociales des petites révolutions, progressivement, sans violence. On peut supposer que ce sera la capacité des acteurs revendiquant les principes de liberté et du droit à aller vers eux, qui changera le rapport de force. Pas d’un seul coup, mais étape par étape.
Les clés de ce combat sont extrêmement complexes à trouver, et n'ouvrent la porte qu'à des années de luttes et de débats pour démontrer, convaincre, faire comprendre que le seul fait, pour la femme, d'être un être humain devrait suffire à lui accorder le droit à la sécurité et à la liberté, qui sont des conditions évidentes au bonheur et à l'épanouissement.

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